10 septembre 2007

LA RENTREE

On se rencontre une nouvelle fois dans LA PAUSE. En cette période de rentrée scolaire nous avons voulu aborder un sujet qui lie l’Argentine et la France dans ce contexte.
Dans ce numéro, nous aborderons le thème des étudiants argentins à Paris. Comment vivent-ils leur expérience universitaire dans la ville « la plus culturelle du monde » ? Pourquoi leur choix s’est-il posé sur Paris ?
Curieusement, c’est un étudiant français qui s’est déjà posé ces questions et qui a choisi d’en faire le thème de son mémoire de Master. Etant donné que nous sommes nous aussi des Argentines ayant choisi Paris comme la ville idéale pour continuer nos études, il nous a semblé intéressant d’apporter à notre propre expérience un regard extérieur, et de le faire collaborer à ce numéro, afin de pouvoir vous apporter une histoire plus complète, en deux dimensions. Une histoire vue à travers deux regards, argentin et français.
Bonne rentrée !

DES ETUDIANTS ARGENTINS À PARIS


Il est 19h, Gabriel me rejoint en dessous de la Tour Eiffel, à l’endroit où nous nous sommes donnés rendez-vous la veille pour effectuer un entretien en rapport avec le mémoire que j’écris sur « les étudiants argentins à Paris ». Levant les yeux au ciel pour bien apprécier l’étendue de la structure métallique, nous sentons traverser en nous l’incroyable masse qui nous surplombe. La Tour Effel est décidément bien plus impressionnante que ce qu’il imaginait, me dit-il. Il est vrai qu’en ce début de mois de septembre elle est particulièrement à son avantage. Les rayons de soleil de l’été apaisé la caressent d’une couleur rouge dorée qui laisse Gabriel rêveur. Arrivé d’Argentine il y a quelques jours, il se dit que son année universitaire commence plutôt bien.
Tout comme Gabriel, de plus en plus d’étudiants argentins viennent chaque année peupler les bancs des facs parisiennes. C’est autour des témoignages de ces étudiants argentins, recueillis au cours de ma recherche, que l’article s’articulera. Nous y découvrirons certaines des raisons qui les ont attirées vers Paris et quelques anecdotes de leur vie universitaire parisienne. En voici quelques morceaux choisis.

Sachons pour commencer que, par la diversité et la renommée de ses universités, Paris représente une destination privilégiée pour bon nombre d’étudiants argentins, majoritairement enclins à se diriger vers les filières de Sciences Humaine ou de Lettres. Cet attrait provient probablement, selon Gabriel, de l’influence de grands sociologues français dont certains étudiants argentins se sont imprégnés tout au long de leur vie universitaire : "Je voulais faire une spécialisation après mes études et la France en sciences sociales a plutôt bonne réputation, et puis il y a Bourdieu, Barthes, Foucault, tous ces auteurs français qu’on a vu à la fac".

Mais la capitale bénéficie également d’un patrimoine culturel important très prisé par certains étudiants, comme nous le montre le témoignage de Flor, pour elle "l’image de la France en Argentine est très positive, c’est la culture, l’éventail des musées et les nombreuses possibilités de pouvoir confronter son esprit à de nouvelles expériences artistiques".

D’autres justifient d’avantage leur choix par l’impossibilité pour eux de poursuivre convenablement leur cursus au pays, comme nous le précise Carlos, doctorant en sciences politiques à Jussieu : "Je voulais faire des études doctorales et c’est assez dure de le faire en Argentine, les doctorats n’on pas bonne réputation, en plus jusqu’à la cinquième année si tu es dans une fac publique c’est gratuit, mais après si tu veux poursuivre tes études, ça devient cher". Il explique que le faible coût des frais d’inscription appliqués dans les universités françaises peut alors devenir déterminant pour des étudiants comme lui, désireux d’accéder à un enseignement de qualité et dont les ressources financières sont parfois restreintes.

Certains étudiants argentins peuvent également bénéficier d’un atout de poids au cours de leur séjour. En effet, les nombreux migrants d’Europe, italiens et espagnols en tête, arrivés au cours du XIXème et du XXème siècle en Argentine, permettent aujourd’hui à de nombreux argentins de pouvoir justifier d’une double nationalité. Disposant d’un passeport européen, certains étudiants argentins ont pu ainsi envisager plus sereinement leur année universitaire en France étant donné, qu’au même titre que n’importe quel européen, ils échappent aux obligations administratives qui accompagnent habituellement le séjour d’un étudiant étranger.

Pour Laura, avoir la double nationalité argentine et danoise lui apporte une liberté de mouvement qu’elle apprécie tout particulièrement. Elle nous explique de quelle manière elle joue sur l’une ou l’autre lors de ses déplacements :

" Lorsque je sors d’Argentine, j’utilise le passeport argentin et quand je rentre en Europe je montre le passeport danois ; ici je me suis inscrite à l’université en tant que danoise, c’est beaucoup plus simple, j’ai pas besoin de visa, de permis de travail, de carte de séjour, en fait j’utilise l’un où l’autre pour des questions de facilité"

Cependant, ce genre de cas de figure ne concerne pas tous les étudiants argentins venus étudier à Paris qui doivent, pour la plupart, se soumettre à des exigences administratives contraignantes, parfois même contradictoires, comme nous l’explique Marian, étudiante en Master à Sciences Pô :

" Par exemple, tu ne peux pas t’inscrire à la faculté si tu n’as pas de titre de séjour, et tu ne peux pas avoir de titre de séjour si tu n’as pas d’inscription à la fac…mais bon, tu parles avec quelqu’un de l’université, et il te dit, ok, bon, on peut t’inscrire sans problème, alors que l’affiche qui est collée sur le mur indique le contraire…tout ça peut compliquer la vie, mais comme en Argentine tout fonctionne un peu près comme ça, on a l’habitude,, par contre un étudiant allemand peut devenir fou ".

En cette période de rentrée, synonyme de stress et d’anxiété, n’hésitez donc pas, si vous apercevez un étudiant en sueur, perdu dans la jungle parisienne, qu’il soit d’Argentine ou d’ailleurs, de sympathiquement l’accompagner sur le chemin de la tranquillité et pourquoi pas lui souhaiter la bienvenue autour d’une Quilmes bien fraîche ou d’un bon Bordeaux !
Mathieu Dumesnil

UNE HISTOIRE DE MUSIQUE

Entretien avec Ezequiel Claverie, étudiant argentin à Paris
Ezequiel Claverie est arrivé à Paris à l’âge de 19 ans. Il est originaire de San Nicolas, une petite ville proche de Buenos Aires.
En Argentine, il étudiait le théâtre et faisait de la musique. C’est à ce moment là qu’il a commencé à aimer « la musique expérimentale ».
Il savait déjà que la France se caractérisait pour être le premier pays à faire de « la musique concrète » qui a inspiré beaucoup d’autres genres musicaux…
Ezequiel connaissait la France par ses idées de diversité et de liberté. Aujourd’hui il retrouve ces valeurs dans son université, à Paris 8.
Au début, il s’était renseigné sur les différentes universités de musique, à Paris, mais entre toutes Sant-Denis était la « plus cool ».
Dans cette université, il s’est senti comme un étudiant parmi tant d’autres. « Jamais je ne me suis senti comme un étudiant étranger, ils te reçoivent avec les bras ouverts et t’aident si tu as des fautes avec la langue française pendant les examens. Je crois que les professeurs aiment avoir des élèves du monde entier ».
Il a suivi quatre années d’études universitaires dont la première était destinée à tous ceux qui n‘avaient pas de connaissances basiques en musique. Il s’est ensuite spécialisé en « musique électronique contemporaine » lors de la dernière année.
« Tout ce que j’ai appris ici, je n’aurait pas pu l’apprendre en Argentine ».
À la fin de son cursus, il a pu présenter une de ses pièces à un concours, laquelle a été choisie pour être jouée à l’Institut Cervantes à Paris.
Son prochain but est maintenant de poursuivre ses études, mais cette fois à Londres.
« Je pars parce que j’ai appris tout ce dont j’avais besoin et maintenant je veux faire des études plus techniques que l’histoire de l’art où de la musique, donc je vais aller à Londres où c’est mieux pour tout ça ».
« J’ai fini l’université à Paris d’une belle manière et j’en garde un très bon souvenir».