12 octobre 2008

« Septembre, un mois de lutte et souvenir »

Le mois de septembre nous a amené beaucoup de souvenirs d’une époque noire de l’Argentine. De l’époque dont les disparitions étaient monnaie courant et personne ne pouvait ni demander, ni questionner pour les « disparus » car comme disait Jorge Rafael Videla, chef du gouvernement militaire argentin entre 1976-1980

« Face au disparu, en tant que tel, le disparu est une inconnu. Si l’homme apparaissait, il aurait un traitement X, et si la disparition se muait en certitude de décès, il aurait un traitement Z. Mais le disparu ne peut avoir aucun traitement spécifique : c’est un inconnu, un disparu, il n’a pas d’identité, il n’est ni mort ni vivant, il est disparu ».

Dès cette époque jusqu’à aujourd’hui il y a des questions à résoudre.

AUSENC`AS

Le premier souvenir nous a été apporté par l’Argentin Gustavo Germano, qui s’est présenté à Paris avec son exposition photographique AUSENCIAS.
Dans le cadre de la 61e Conférence des Droits de l’Homme qui a eu lieu au siège de l’UNESCO à PARIS, la Fondation Culture de Paix et la Délégation du gouvernement de la Catalogne en France ont rendu possible pendant une semaine la présence d’« Absences ».
Gustavo Germano habite à Barcelone et c’est de là qu’il a commencé a travailler dans ce projet qu’aujourd’hui partage avec nous.
Cette exposition montre l’avant et l’après de la dictature argentine entre les années 1976 et 1983, mais ce qui manque, ce que le photographe n’arrive pas à montrer avec son appareil photo, c’est « ce qui touche », qui fait penser qu’il y a un vide évident entre ces deux photos de l’avant et l’après.
AUSENCIAS cherche et trouve dans la complicité des familles sa raison d’être. Dans son attitude militante, les familles des victimes revendiquent, en posant devant l’appareil photo, la place qu’il aurait dû occuper. Et dans ce vide, on voit ceux qui ne sont pas là.
"Absences" réveille une prise de conscience de cette brutalité en la rapprochant ou en la faisant « visible » dans le cadre le plus estimé : le quotidien, le cher, l´intime. Ce n´est pas nécessaire d´en montrer plus pour exposer la violence militaire qui a déterminé ce présent quotidien et perpétuel marqué par l´absence de l´être cher. Un présent aussi violent que 30 000 absences qui se multiplient exponentiellement et qui se révèlent dans tous ceux qui sont aujourd’hui présents.
AUSENCIAS est surtout une exposition citoyenne ou de citoyens qui s´exposent. Épouses, frères, belles-sœurs, filles, mères, amis, citoyens et citoyennes qui, un jour, ont vécu l´enfer de la violence exercée, contre eux, par le gouvernement de leur pays. Citoyens et citoyennes qui par leur attitude complice et militante disent : je suis ici pour que tu voies qui n´est plus là, j´exerce la pratique du souvenir pour que le silence ne gagne pas la partie, c´est pour cela que je m´expose et me laisse photographier.

«Jorge Julio Lopéz, deux ans sans nouvelles»

Le deuxième souvenir, c’est plutôt une lutte. Ça fait deux ans qu’a disparu Jorge Julio Lopez et aucune autorité gouvernementale ne répond à cet écho.

Le 18 septembre 2006 Lopez participait en qualité de victime, de témoin et de plaignant au procès pour l’emprisonnement du tortionnaire Miguel Etchecolatz auquel il devait assister. Le problème c’est que jamais Lopez n’est arrivé a témoigner et personne ne l’a vu non plus.
À Paris, à l’occasion de sa deuxième année de disparition, l’association HIJOS Paris, s’est réuni, le 18 septembre 2008 pour réclamer, pour demander que la justice fasse son travail, puisqu’elle n’a pas cherché à résoudre la disparition de Lopez.

Jorge Julio Lopez a disparu comme les 30000 personnes qui ont disparu pendant le gouvernement militaire. La différence c’est qu’après 28 ans, les militaires ne sont plus au pouvoir et qu’aujourd’hui l’Argentine est une démocratie avec un gouvernement qui dit veiller sur les droits humains.

La lutte donc continue, l’exposition AUSENCIAS reflète une réalité qui existe encore quelque part en Argentine. Cependant, aujourd’hui il y a des gens qui peuvent s’exprimer pour ces impunités et qui les condamnent même si les autorités ne le font pas.

On demande pour l'apparition en vie de Jorge Julio Lopez.