17 avril 2008

Un parc pour la Mémoire

Rarement on se rend dans un parc avec un esprit de recueil et dont la promenade laisse un nœud dans la gorge, taisant tous les mots, étant le silence l’accompagnateur idéal le long du parcours. C’est la sensation que produit la visite du Parc de la Mémoire à Buenos Aires. Il s’agit d’un espace publique crée avec l’objectif de construire, récupérer et préserver la mémoire collective afin de participer à ce que les violations des Droits de l’Homme ne se reproduisent plus jamais.
Ce parc, qui englobe 14 hectares d’espace vert au bord du fleuve de La Plata, à été mis en œuvre en 2001 à la demande d’une commission composée d’organisations de Droit de l’Homme, les Mères et Grands-Mères de la Place de Mai, des familiers des disparus et des membres du gouvernement de la ville de Buenos Aires. L’objectif étant d’obtenir un monument pour rendre hommage aux victimes du terrorisme d’état.
Ce parc a de cette manière une valeur testimoniale unique en Argentine. Il héberge le Monument aux Victimes de la Terreur de l’Etat, formée par quatre stèles donnant la forme d’une coupure, d’une blessure ouverte sur une pelouse qui finit dans le fleuve. Des plaques sur les stèles contiennent les noms des détenus-disparus et assassinés pendant les années qui débutent depuis « le Cordobazo » (1969) jusqu’à la fin de la dictature militaire (1983).
Ce monument est le premier mémorial consacré en Argentine pour rendre hommage aux victimes des années les plus noires du pays. La plaie qu’elle représente marque sur le territoire argentin une douleur qui sera toujours présente. L’idée est de la parcourir et d’arriver jusqu’au fleuve qui a toute la valeur du symbole, car c’est dans ces eaux que les victimes ont été jetées par les « vols de la mort » .
Les corps absents, ce parc rend hommage aux noms de ceux qui se sont battus pour un pays meilleur. De même, des sculptures d’artistes argentins et internationaux sont érigées dans une partie du parc pour que l'art participe également au témoignage.
Il y avait peu d’endroits dans la capitale argentine pour réaliser ce projet, car, comme on entend habituellement, la ville a été bâtie avec la particularité assez troublante de tourner le dos au grand fleuve. Les faits sont là, il faut désormais les regarder en face ; la construction de ce parc fait que pour la première fois la ville de Buenos Aires se retourne face à son fleuve.

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